Grande Bretagne

Scottish spirit au Fife Arms hotel

Scottish spirit au Fife Arms hotel

Sous le ciel impétueux du parc national des Cairngorms, en Écosse, s’élève The Fife Arms. Cet ancien relais de poste bâti au XIXème siècle par le duc de Fife, dans le village de Braemar, connaît un second souffle grâce à l’un des couples les plus influents du monde de l’art contemporain.

 

Au coeur des Highlands battus par les vents froids et recouvertes de bruyères, se cache le village de Braemar. Quatre cents habitants, deux hôtels centenaires, un boucher, une galerie d’art et quelques minuscules cottages en granit, cheminées fumantes sur les toits et rideaux en tartan accrochés aux fenêtres. C’est dans ce village que Manuela et Iwan Wirth, discret power couple derrière la galerie d’art contemporain Hauser & Wirth, ont décidé d’acheter et rénover The Fife Arms.

Vue sur l'hôtel Fife Arms

The Fife Arms

Pour l’atteindre, il faut traverser d’immenses forêts de pins, longer le cours de la River Dee et tenter d’apercevoir la tour crénelée du château de Balmoral, repaire de la famille royale depuis que la reine Victoria est tombée sous le charme de ces contrées lointaines et sauvages. Cette terre, la reine Elizabeth se l’est aussi appropriée. Les aficionados de la série The Crown reconnaîtront d’ailleurs ces lieux où notre héroïne royale s’échappe et retrouve un peu de sa liberté entre deux engueulades avec le prince Philip. Il est vrai que nous sommes ici à l’abri des hordes de touristes, et aussi très loin du tumulte de la vie citadine. C’est dans cette campagne que l’on découvre ce sentiment paradoxal : se sentir ancré dans le vrai tout en échappant à la réalité. Notre “Ghillie”, concierge en kilt et chaussettes de laine, nous attend sur le parking enneigé du Fife Arms. Caché contre sa jambe, un poignard aux armes de son clan. Il nous accueille avec un franc et cordial accent du nord, à la fois rocailleux comme les montagnes environnantes, doux et rafraîchissant comme les intonations gaéliques. C’est en sa compagnie que nous découvrons le Fife Arms.

 

Tableau fife arms hotel braemar

Faustine Poidevin

 

Chefs-d’œuvre, convivialité et âme des lieux

Dès l’entrée, il nous présente fièrement le croquis d’un cerf, réalisé au fusain par Son Altesse Royale la reine Victoria. Un peu plus loin, nous apercevons une toile de Lucian Freud et un des légendaires mousquetaires de Pablo Picasso. Comme il est exceptionnel de pouvoir vivre quelques jours en compagnie de tels chefs-d’œuvre ! C’est autre chose d’observer une toile de Francis Picabia en sirotant un whisky plutôt que de l’entrapercevoir sur les murs aseptisés d’une galerie d’art… À ces trésors de l’histoire et de l’art se mêlent à l’heure du thé le crépitement du feu dans les imposantes cheminées, le tintement des tasses délicates sur leurs soucoupes et les pages du livre que l’on feuillette confortablement installé sous un plaid en tweed.

 

Escaliers de l'hôtel fife Arms

Faustine Poidevin

 

S’il y a dans ce lieu une chaleur et une convivialité surprenantes pour un hôtel qui n’a ouvert ses portes que depuis quelques mois au moment de notre visite, la raison en est simple : le Fife Arms est le cœur du village de Braemar depuis 1856. Manuela et Iwan ont tout de suite senti que les habitants avaient donné une âme à ce lieu et ont souhaité que la communauté y conserve sa place. Lors de la rénovation, les deux galeristes ont commissionné de nombreux artisans, ouvriers, et artistes originaires de Braemar, des personnes à forte connexion avec le lieu. C’est ainsi que l’on découvre, faisant face à une araignée de Louise Bourgeois, un lustre monumental en bois de cerfs créé par Gareth Guy, artisan et habitant du village. Au Flying Stag, le très typique pub de l’hôtel, les autochtones bénéficient d’un prix d’ami, 6 pounds le déjeuner, et leurs 400 portraits, réalisés par le peintre Gedeon Summerfield, sont d’ailleurs accrochés aux murs. On s’amuse à observer cette joyeuse compagnie, escortée de chiens et enfants, dégustant un délicieux fish & chips ou une pinte de bière locale, jouant à qui trouvera l’effigie d’untel en premier.

Numéro de chambre

Faustine Poidevin

 

Un mixologiste italien et un chef norvégien

Tous les dimanches soir, place à la chorale dans l’un des riches salons. Les habitants se mêlent à Marco Fante, le mixologiste italien qui revisite les classiques dans un bar aux couleurs rosées. Magnus Burstedt vient lui aussi d’arriver, c’est le chef norvégien qui a imaginé une carte autour de la cuisson au feu de bois (mention spéciale pour ses langoustines). Jeunes et anciens, locaux et étrangers, trouvent ainsi leur place au sein de cette petite communauté, et les convives sont les éphémères témoins de cette rare et touchante osmose. Dans cette volonté de partage, notre Ghillie nous annonce que nous allons passer notre dimanche avec Katy Fennema.

 

Chambre du fife arms hotel braemar

The Fife Arms

 

Écossaise pure souche, Katy et sa famille vivent à Braemar depuis toujours. À bord de son 4x4 aux sièges chauffants, Katy sillonne les landes du parc des Cairngorms. À chaque virage, une anecdote, elle connaît tous les chemins de traverse, toutes les rivalités entre clans (ces potins séculaires que l’on se raconte de génération en génération), nous montre les meilleurs spots pour observer ces rares écureuils rouges qui habitent les bois des environs, elle nous parle de gin et de whisky, de l’indépendance écossaise et de l’impact des Wirth sur la région. Ce couple qui a décidé de redonner vie au Fife Arms a en fait insufflé un vent de nouveauté et de fraîcheur à l’ensemble du village de Braemar. Attachant et douillet, on quitte ce lieu comme l’on quitterait une maison de famille enfant, nostalgique, avec déjà l’envie d’y revenir.

 

Photographie de couverture et texte

FAUSTINE POIDEVIN