Egypte

Radio Voyageurs : 100% Egypte

Radio Voyageurs : 100% Egypte

Avec Jean-Pierre Chanial, journaliste, écrivain et grand voyageur, Michel-Yves Labbé, président de Départ Demain et Jean-François Rial, président de Voyageurs du Monde.

 

Avant de commencer, Valérie Expert insiste sur l’attachement de tous ses invités à l’Egypte, un pays qu’ils trouvent tous merveilleux. Puis elle pose une première question, celle de savoir si on peut s’y rendre actuellement.

 

De « l’urgence » d’aller en Egypte

“Je dirais qu’il est urgent d’aller en Egypte car les conditions de sécurité sont totalement remplies. Surtout, le pays est en train de vivre un boum de demande très forte. Du coup, on risque de se retrouver dans six mois avec un pays qui va à nouveau déborder de touristes. Et si on veut appliquer le principe Radio Voyageurs du Monde, c’est à dire de voyager hors des sentiers battus, c’est maintenant qu’il faut aller en Egypte. On commence d’ailleurs à ne plus avoir de place à certaines dates”, constate Jean-François Rial, pour qui l’Egypte est un pays époustouflant et même son préféré au monde.

Vallée des rois

Valérie Expert rétorque que ce n’est pourtant pas l’image qu’on en a. Mais Jean-François Rial insiste : “Notre fameux bateau sur le Nil est plein jusqu’à la fin de l’année ! On est à 500 clients par mois… C’est ça la réalité”. Michel-Yves Labbé étoffe les propos de Jean-François Rial avec des chiffres : “En 2010, avant la Révolution Arabe, il y avait à peu près 13 millions de touristes par an. C’est tombé à 8 millions en 2013, puis à 4 millions en 2016. Depuis février, les Russes volent à nouveau sur Sharm el Sheikh. Et ils représentent 1,6 millions de touristes par an. On pense qu’en 2018, il y aura de nouveau 7 à 8 millions de touristes en Egypte. Il faut donc en profiter tout de suite”.

Temple d'Edfou

Jean-Pierre Chanial ajoute qu’aller en Egypte, c’est essentiel : “On s’élève d’un cran par rapport à l’histoire du monde, de nos civilisations. Et même si la situation n’est pas toujours stable, c’est un pays où on fait encore des découvertes comme récemment près de Louxor. Et c’est maintenant qu’il y a le moins de monde, que les sites sont le plus accessibles, que l’on peut savourer en toute tranquilité les plus beaux vestiges de la planète et surtout les plus essentiels des enseignements pour l’humanité. C’est absolument irremplaçable”.

 

Sur le Nil

Et c’est le long du Nil que l’on peut découvrir beaucoup de ces vestiges et que Valérie Expert embarque ses invités. “Officiellement, il y avait 400 bateaux sur le Nil dont 200 naviguaient vraiment, explique Jean-François Rial, depuis trois ans, un seul navigue tout le temps, c’est le nôtre”. Depuis six mois, il constate que quelques uns reviennent sur les eaux du Nil. Jean-Pierre Chanial en profite pour insister sur la beauté du bateau de Voyageurs du Monde, “exceptionnel puisqu’il s’agit du Steam Ship Sudan, l’ancien bateau du Roi Farouk”.

Michel-Yves Labbé revient sur le retour des touristes en Egypte : “C’est vrai que c’est agréable de se balader tout seul dans la Vallée des Rois, mais d’un autre côté, ça fait de la peine pour le pays et pour les gens”. Il ajoute que grace aux stations balnéaires de la mer Rouge comme Hurghada, Louxor redémarre grace aux excursions d’une journée. Il rappelle aussi qu’entre Louxor et Assouan, le clientèle qui fait des croisières sur le Nil est traditionnellement française.

A propos de clientèle, Valérie Expert en profite pour demander comment on voyage en Egypte, en famille, en couple ? Pour Jean-Pierre Chanial, tout est possible : “Quel enfant n’a pas envie de voir le Sphinx au nez qui manque et les pyramides ? C’est fabuleux. Et qui résisterait quand on est main dans la main au temple de Philae par exemple et que le soleil se couche ? Ca mérite bien un baiser !”

Retour sur le Nil : Est-il préférable de le descendre ou de le monter ? Valérie Expert interroge ses invités. Jean-François Rial ne voit pas de grande différence, “à part si on se trouve sur un bateau particulier comme la Flâneuse du Nil, la dahabeya de Voyageurs du Monde, une grande felouque à deux mâts- qui d’ailleurs naviguera sur le lac Nasser à partir du mois de février-, il y a un sens où il y a plus de vent que l’autre : en descendant le Nil”. Il ajoute aussi que Voyageurs du Monde va changer sa formule de quatre nuits sur le Nil à cinq car “il faut naviguer sur le Nil, non seulement pour les sites archéologiques somptueux mais aussi pour ses rives, ses paysages, ses couleurs et son agriculture ancestrale”.

Pour ajouter au tableau, Jean-Pierre Chanial dévoile deux lieux insolites à Assouan : “En plus des “obligations” que sont Abou Simbel, le temple de Philae et l’hôtel Old Cataract, hélez un gars qui a une petite barcasse pour négocier une après-midi dans les petites îles en face d’Assouan. Elles ont un charme fou et il y a peu de touristes : l’île Elephantine, l’île des Fleurs, l’île de Sahel et l’île Salouga”. Il les décrit comme des petits bijous. Mais c’est particulièrement sur l’île des Fleurs, qu’il fait débarquer ses auditeurs, une île donnée en cadeau au Britannique Lord Kitchener en échange de son aide contre les invasions venant du Sud au 19ème siècle. Passionné de botanique, ce dernier a conçu un jardin extraordinaire de plantes, d’essences, de fleurs, rempli d’oiseaux… Jean-Pierre Chanial conseille aussi la visite du monastère Saint Siméon et du mausolée de l’Aga Khan, où sa femme, la Bégum, est venue jusqu’à sa mort poser une rose chaque jour sur la tombe de son mari.

Jean-François Rial enchaîne sur l’hébergement dans les hôtels Old Cataract à Assouan et au Winter à Louxor, des hôtels qui n’ont pas été rénovés, vieillots et où “il faut absolument aller. On a des suites avec vue sur le Nil pour rien du tout…”. Il recommande fortement de se dépêcher d’en profiter.

Le Winter Palace et son jardin botanique exceptionnel

Valérie Expert fait un petit crochet par le lac Nasser que Jean-François Rial associe à une méditation. Pour lui, “le voyage idéal, c’est cinq jours sur le Steam Ship Sudan et quatre jours sur la Flâneuse du Nil sur le lac Nasser, vous faites un truc de rêve…” Plus pragamatique, Michel-Yves Labbé conseille fortement une semaine à Louxor : “C’est fantastique l’hiver car le climat est parfait. On peut bronzer, se baigner. C’était d’ailleurs une station balnéaire. C’est du balnéo-culturel !”

 

Le Caire confidentiel

Cap sur Le Caire, la ville que Valérie Expert aime le plus au monde : “Ca grouille, il y a de la vie, c’est une ville exceptionnelle”. Michel-Yves Labbé adore aussi tout en préférant quand même Toulon, une préférence qui déclenche les rires des invités… Il argumente : “J’adore me balader au Caire, j’adore les petites boutiques partout, les gens qui vont, qui viennent, il y a une sérénité incroyable.  On ne se sent pas du tout en insécurité au Caire. C’est une ville bruyante, fatigante mais c’est une ville passionnante et il y a des quartiers calmes… Et puis il y a le Sphinx, les pyramides, le son et lumière avec les mots de Malraux. Le Caire, c’est le noeud, il faut s’y arrêter.”

Jean-François Rial surenchérit :”Traîner dans le Caire Islamique, c’est fabuleux. C’est tout le quartier du centre historique qui est autour de l’université d’Al-Azhar, tous les vieux bâtiments islamiques, les mosquées… “ Puis il dévoile un endroit très peu connu en haut du quartier des Chiffonniers : “Là-haut, vous trouvez des églises troglodytes incroyables. Vous pouvez y aller quarante fois, il y aura toujours quelque chose que vous n’aurez pas vu”… Il recommande ensuite la lecture d’Automobile Club d’Egypte d’Alaa El Aswany : “C’est extraordinaire, vous comprenez la société egyptienne, ses codes, la corruption hiérarchisée. Il faut aussi aller voir Le Caire Confidentiel, tout est dans le titre du film”…

Aux quartiers cités précédemment par Jean-François Rial, Jean-Pierre Chanial ajoute le Grand Marché, les petits marchés de quartier où “on parle avec les gens, on négocie… Le vrai bonheur, c’est de participer au quotidien des Cairois”.

Valérie Expert soulève la question de l’hébergement au Caire : Faut-il loger près des pyramides ou en ville ? Ses invités s’accordent à répondre que cela dépend de la sensibilité des gens. Jean-François Rial alerte sur le fait qu’il n’y a pratiquement pas d’hôtels de charme au Caire. Il conseille ceux, bien placés, où il reste régulièrement : le Four Seasons Garden City et le Sofitel. Il emmène ensuite les auditeurs dans les quartiers à découvrir “pour ceux qui veulent comprendre l’histoire du Caire : Maadi au sud, Garden City, plein de villas splendides et évidemment l’île de Zamalek au milieu de la ville et là vous allez mélanger architecture britannique, ottomane, et même omanaise, zanzibari”…

 

La mer Rouge et Alexandrie, l’ “oubliée

Du caire, Valérie Expert entraîne ses auditeurs vers les bords de la mer Rouge. Michel-Yves Labbé conseille un hôtel magnifique, au sud de Hurghada, l’Oberoi, puis, au sud, les baies de Macadi et de Soma “avec des golfs et des hôtels de bonne qualité. Ce n’est pas aussi construit que Hurghada, les fonds marins sont splendides. Il fait très beau, chaud et sec. C’est une belle destination balnéaire, un beau soleil d’hiver pas loin”.

Denis Dailleux

Valérie Expert bifurque ensuite par Alexandrie, l’ “oubliée” des voyages en Egypte. Jean-François Rial aquiesce, parle de son histoire incroyable, de son front de mer magnifique, de ses vielles bâtisses en boiseries, de “ses antiquaires de folie”, de gens cultivés, de la fameuse bibliothèque. Il enchaîne sur Siwa où le Quai d’Orsay déconseille d’aller, “sauf si… on connaît très bien la région, la situation et si on est introduit”, explique Jean-François Rial. Il poursuit : “C’est la plus belle oasis du Sahara, de très très loin. Je pense qu’elle sera bientôt de nouveau accessible aux touristes”. Il termine en mentionnant l’hôtel le plus écologique du monde, l’Adrere Amellal conçu par Mounir, un des hôtels qui l’a le plus impressionné au monde.

 

L’accueil chaleureux des Egyptiens

Jean-François Rial clôt ses éloges de l’Egypte en parlant de ses habitants qu’il décrit comme le “le peuple le plus gentil au monde, dans le sens où ils ont la même attention que les Mauritiens avec quelque chose en plus dans la chaleur humaine, quelque chose qui n’est pas codé, et ce, qu’importe la religion”. Valérie Expert partage son avis tout comme Jean-Pierre Chanial pour qui “un bagage culturel de plus de 15 000 ans d’histoire permet de garder les sens en éveil”. Il insiste sur le fait qu’avant l’actualité brûlante de ces dernières années, toutes les communautés de confessions religieuses différentes vivaient en harmonie. Enfin, plus pragmatique, il met en garde sur l’eau qu’il ne faut absolument pas boire, et les glaçons qu’il faut éviter si on ne veut pas tomber malade.

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La carte postale de Michel-Yves Labbé

Michel-Yves Labbé emmène les auditeurs en voyage entre Le Caire et Hurghada via une petite station balnéaire au sud de Suez, Zafarana. “On peut y passer la nuit et surtout aller voir deux monastères totalement à l’écart des routes habituelles”, explique-t-il. D’abord, il y a le monastère de Saint-Antoine, disciple de Saint-Matthieu, l’évangéliste. Il vécut au 3ème siècle. Héritier d’une famille très riche, il abandonne tous ses biens et se retire dans le désert, dans une grotte près d’une source jusqu’à sa mort à 105 ans. En 298, des disciples font bâtir un monastère. “On dit que c’est le plus vieux du monde. Aujourd’hui, une dizaine de moines y vivent toujours, certains dans des grottes. Tous profitent d’un jardin magnifique car il y a en fait trois sources. C’est une véritable oasis dans le désert avec quatre églises et un très beau clocher du 6ème siècle. A l’intérieur, on y trouve les plus belles fresques coptes d’Egypte. Les plus anciennes datent du 7ème siècle, les plus récentes du 13ème siècle. C’est fascinant”, explique Michel-Yves Labbé.

Puis, un peu plus loin sur la route des montagnes de la mer Rouge, on arrive au monastère de Saint-Paul l’Anachorète, plus rustique que le précédent. Saint-Paul fut le premier anachorète our ermite. Il venait de Thèbes. En 251, il fuit les persécutions contre les Chrétiens et s’installe dans une grotte à côté d’une source. Il s’y trouve bien. “Les feuilles d’un palmier lui servent à se vêtir, il se nourrit de ses dates. Ca dure 43 ans comme ça et le palmier meurt. Alors là, Dieu lui envoye tous les jours un corbeau qui lâche un demi-pain pour qu’il tienne le coup et ça dure encore quelques dizaines d’années”, raconte Michel-Yves Labbé. .Le jour de sa mort, il voit arriver Saint-Antoine, son “jeune” voisin. Ce dernier croyait en effet être le plus vieil ermite ! Saint-Paul l’accueille à bras ouverts, le corbeau livre une miche entière, et après des discussions entre ermites, Saint-Paul décède à l’âge de 113 ans. Il poursuit : “Un culte à ces ermites est né : le monachisme, un monastère est construit, entouré de très hauts murs pour résister aux Bédouins, aux Berbères, aux Turcs, aux Kurdes… Les plus courageux iront dans la montagne jusqu’à la grotte de Saint-Paul où il y a 1200 marches à monter mais la vue est grandiose, jusqu’à la mer Rouge, vous allez adorer”. Et pour se reposer de ces découvertes, Michel-Yves Labbé recommande fortement de passer la nuit à l’Oberoi à Hurghada. 

 

 

Photographies

ARMAND LAGRANGE & OLIVIER ROMANO