Souvent comparée à la Grèce avec qui elle partage, il est vrai, de jolis bouts d’histoire, de mythologie et de culture – culinaire, notamment –, Chypre a l’avantage de contenir sa richesse dans un territoire grand comme un mouchoir de poche. Moins de 10 000 km² où se côtoient pourtant des paysages d’une surprenante diversité : montagnes, vallées paisibles, sable doré, vignobles, petits villages pittoresques. Ponctués, un peu partout, de vestiges antiques d’une incommensurable valeur. Voici notre sélection des plus beaux sites chypriotes.
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Le mont Olympe
La Grèce n’est pas la seule à avoir son mont Olympe. À Chypre, il s’agit même du point culminant, toisant de ses 1951 mètres le massif du Tróodos et l’île tout entière. Selon la mythologie, la montagne, localement appelée Chionistra, aurait été créée par les dieux – Zeus Héra, Athéna, Poséidon, Artémis, Apollon, Aphrodite, Héphaïstos et les autres – à la suite de la bataille qui les opposa aux Titans. Vainqueurs, ils s’installèrent en son sommet, préservant leur intimité au moyen d’une écharpe de nuages. Désormais, c’est une station de ski – la seule de Chypre – qui occupe les hauteurs du mont sacré, blanchies chaque année par la neige. Proportionnel au pays, le domaine skiable se compose d’une quinzaine de pistes et de quatre remontées mécaniques. Aux beaux jours, le mont Olympe prête ses versants aux randonneurs qui cheminent alors parmi cèdres argentés et endémiques pins noirs centenaires. De jolis sentiers invitent à explorer des paysages typiquement méditerranéens – celui de Kaledonia, notamment, mène à une cascade insoupçonnée. Quant au sentier d’Artémis, bel itinéraire au cœur du parc national forestier du Tróodos, il permet en sept kilomètres (3h environ) de rallier le sommet de l'Olympe. La boucle, tantôt ombragée, tantôt découverte, dévoile des vues imprenables sur les autres montagnes du massif et même, par temps clair, jusqu'à Paphos et Limassol, sur la côte. En chemin, on croise les ruines de Palias Choras de Teisia, forteresse construite au XVIe siècle par les Vénitiens pour se défendre des Ottomans.
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Les villages et les vignes du Tróodos
Aux montagnes ancestrales du Tróodos, principal massif chypriote, se sont accrochés d'adorables villages, aux ruelles pittoresques, aux placettes ombragées et aux traditions artisanales et culinaires encore bien vivaces. Kalopanayiotis, paisible bourg d’altitude, capitalise sur le charme de ses vieilles pierres, ses bonnes petites tables traditionnelles et, surtout, son incroyable environnement naturel. À Lófou, inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco, les hommes vivent depuis l'Âge de Bronze. On y flâne le nez en l’air tombant, au hasard d’une venelle, sur une boulangerie, une taverne ou un petit café resté dans son jus, tandis qu’à Limnatis, on croque avec plaisir ces délicieuses amandes cultivées dans les environs. Du côté de Lania, on touche déjà à une autre grande spécialité locale : le vin, produit sur l’île depuis des siècles. L'histoire raconte en effet que, lorsque les vignobles champenois furent détruits par la maladie, le roi Henri Ier aurait choisi des plants de vigne originaires de Lania pour les remplacer. Lovée dans la vallée de Solea, entourée de pinèdes et vergers, Kakopetriá aligne, elle, de superbes maisons aux balcons de bois tout près d’un moulin à eau de 1754 et de l’église peinte d’Agios Nikolaos tis Stegis, dont certaines fresques murales remontent au Xe siècle. De Pano Plâtres, perché à 1100 mètres d’altitude au milieu de forêts, partent de nombreux sentiers de randonnée sillonnant cette partie sauvage de l’intérieur de l’île. Divisé en deux parties, le village au charme suranné constitue également un merveilleux tremplin pour visiter les vignobles cultivant xynisteri, lefkada, mavro mais aussi cabernet sauvignon, syrah et le fameux commandaria, vin doux à la robe caramel.
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Le site archéologique de Paphos
Au sud-ouest de Chypre, le site de Paphos, habité depuis le Néolithique, est tout entier dédié à Aphrodite pour qui les Mycéniens ont construit un temple au XIIe siècle. Autour, les vestiges de tombes, palais, forteresses, théâtres et villas redonnent vie à Nea Paphos, cité sacrée elle aussi érigée en l’honneur de la déesse. Le site est particulièrement connu pour ses mosaïques qui couvraient le sol des villas, figurant parmi les plus belles au monde. Tout cela s’admire au sein d’un environnement naturel paisible et préservé, bordé par la mer. Dans la ville « moderne », tournée vers le tourisme balnéaire, on est étonné de trouver, entre deux hôtels, de vieilles pierres de grande valeur historique et, dans la ville haute, des réminiscences islamiques que l’on doit à la présence d’une ancienne communauté turque.
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La plage d'Aphrodite
À proximité de la ville de Pissouri, sur la côte sud, se trouve l’un des sites les plus emblématiques de Chypre, de très haute importance mythologique. Il s’agit d’une jolie plage de galets d’origine volcanique baignée d'eaux turquoise et étonnamment paisible. Ce qui fait la particularité du lieu n’est pas uniquement sa beauté mais aussi ce rocher flottant à quelques mètres de la plage : le célèbre Pétra tou Romioú. Ce dernier marque le lieu de naissance d’Aphrodite, déesse de l’amour et de la fertilité, née de l’écume de la mer. Il doit cependant son nom – littéralement le « rocher du Grec » – à la légende du héros byzantin Digénis Akritas qui, en voulant protéger l’île de l’invasion arabe, aurait jeté cette roche à l’ennemi. Des légendes plus récentes prétendent que faire trois fois le tour du rocher à la nage garantirait chance, amour et beauté éternelle. On risquera surtout de boire la tasse, le courant étant parfois assez fort sur ce bout de littoral. Du côté de Pissouri et du cap Aspro, d’autres plages, aux belles falaises immaculées et aux eaux tout aussi limpides, promettent des baignades plus sereines.
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Le site archéologique de Kourion
À l’ouest de Limassol et de son effervescence balnéaire, le merveilleux – et gigantesque – site de Kourion invite à un véritable voyage dans le temps. Importante cité-État jusqu’en 365 après J.-C. – année de sa destruction par un terrible tremblement de terre –, Kourion disparut des radars pour ne ressurgir que bien des siècles plus tard, révélant alors au monde un patrimoine incommensurable. Le site protège notamment de superbes mosaïques antiques représentant des scènes de vie de l'époque (les plus belles datant du Ve siècle). Immanquables, les vestiges de l'agora, des bains publics, de la Maison d'Eustolios, de la Maison des Gladiateurs et de la Maison d'Achille sont absolument grandioses. Mais ils n'égaleront jamais l'emblématique amphithéâtre gréco-romain, ouvert sur la Méditerranée et capable d'accueillir jusqu'à 2000 spectateurs ! À deux kilomètres au nord-ouest, le sanctuaire d'Apollon Hylates, surplombant la superbe baie de Zapallo, fut longtemps l'un des hauts lieux de culte du dieu, vénéré ici en tant que divinité de la forêt. Les vestiges archaïques, ptolémaïques et romains s'y superposent, témoignant de huit siècles de culte. La meilleure manière qui soit de réviser la mythologie grecque.
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La baie de Chrysochou
Au nord-ouest de Chypre, la baie de Chrysochou, aux sublimes eaux turquoise, permet d’accéder facilement à la jolie péninsule d’Akamas et à son parc national forestier (230 km²). Il s'agit d'une zone montagneuse encore sauvage, moins fréquentée que le reste du littoral – un écrin insoupçonné de biodiversité recelant de nombreuses espèces endémiques, végétales (plus de 135) et animales (19 espèces de chauve-souris, 9 types de papillons...). Il faut dire qu’aucune route pavée ne vient perturber la vie de la péninsule où cohabitent renards, musaraignes, lézard du Tróodos, souris de Chypre et autres grenouilles sous le regard des vautours fauves, chouettes et parulines de Chypre. Les sentiers de randonnée dévoilent des plages de sable doré bordées de falaises affûtées, gorges encaissées, plaines arides et denses forêts verdoyantes. Dans la partie marine du parc vivent également plusieurs espèces de dauphins, des tortues vertes et des tortues caouannes qui ont l’habitude de pondre sur la plage de Toxeftra.
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La cité fortifiée de Salamine (Famagouste)
Pour atteindre Famagouste, il faut franchir la ligne de démarcation qui sépare la Chypre du sud de celle du nord, sous occupation turque. De l’autre côté, face à la mer, se trouvent les ruines de l'ancienne ville-royaume de Salamine. Capitale de l'île à l'époque romaine, la cité était alors absolument monumentale, comme en témoignent les impressionnants vestiges du gymnase et du théâtre. Également colossale, la muraille construite au Moyen Âge s’étend sur trois kilomètres et mesure, par endroit, une quinzaine de mètres d’épaisseur. C’est aux Vénitiens du XVIe siècle que l’on doit cette prouesse militaire composée de douves profondes et de pas moins de quatorze bastions. Il fallait au moins cela pour protéger la cathédrale Saint-Nicolas, superbe édifice baroque achevé au XIVe siècle, où étaient alors sacrés les rois francs de Chypre. L’église fut transformée en mosquée (Lala Mustafa Pacha) lors de la prise de Famagouste par l’Empire ottoman, au XVIe siècle.
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La belle ville de Kyrénia
À une trentaine de kilomètres au nord de Nicosie, la jolie ville pittoresque de Kyrénia trempe ses jambes dans la Méditerranée. Au bout de l’ancien port, les Vénitiens ont laissé un château (Girne Kalesi), construit au XVIe siècle au-dessus de fortifications datant de l’époque des croisades. Telle des poupées russes, on découvre à l’intérieur d’autres édifices : une église byzantine du XIIe siècle et deux musées, sans oublier la célèbre épave de Kyrénia, restes d’un navire marchand grec datant du IVe siècle. En surplomb de Kyrénia, perché à 220 mètres de hauteur, le monastère de Bellapais (XIIIe siècle) offre une vue spectaculaire sur toute la ville, son port et la Méditerranée. En y croyant très fort, on pourrait presque voir la Turquie, distante d’une centaine de kilomètres, se dessiner à l’horizon.
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Par
ELÉONORE DUBOIS
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