Inde

Kerala, l’Inde douce

Kerala, l’Inde douce

C’est une Inde qui se déguste : redécouvrir le temps qui passe en se laissant flotter le long des backwaters, et respirer tous les verts de l’Inde, celui des feuilles de liserons d’eau, celui des feuilles de palme, celui des pousses de riz ; car l’Inde peut être douce, aussi.

 

Gandhi disait que l’Inde était avant tout rurale. On la voit peu, cette Inde là, elle disparait derrière les monuments mythiques, se planque derrière l’écran que forment les grandes villes, et, tranquille, elle vit sa vie. Le Kerala c’est l’Inde sereine, entre eau et eau, un univers en soi, un peu flottant,  comme si la terre ici n’était pas bien ancrée, pour mieux nous bercer au gré des courants, nous inviter à lâcher prise à chaque instant.

 

jolie photographie de Kerala

 

Vers la proue de l’Inde, tout en bas dans la pointe, sur la jolie plage de Kovalam piquetée de cocotiers  est un premier lieu pour apprendre à souffler. L’ombre des arbres dessine une constellation d’étoiles sur le sable, invitation à s’allonger pour passer quelques heures en plein jour la tête dans les étoiles. On y resterait bien, si l’eau de l’Océan Indien n’était pas si tentante (mais elle est là et elle est tiède, alors on se met un petit coup de sel sur la peau). Si l’on aime la mer, on pourra refaire des pauses le long de la côte de Malabar, qui s’étire sur près de 600 kilomètres : des villages de pêcheurs qui vivent au rythme de la relève des filets, des plages où piquer une tête.

 

pécheurs de cochin

 

L’autre eau du Kerala c’est celle des backwaters, que l’on peut remonter nonchalamment à bord  d’un kettuvallam, ces house boats de la région, de bois et de vannerie, où l’on se met au rythme du lieu, passeport pour apprendre à profiter du temps lent, et de cette drôle de vie amphibie. Ici, on croise un paysan qui soigne son bœuf dans les canaux, de l’eau jusqu’aux épaules. Là, on suit un chargement d’écoliers en uniforme, qui rentrent de l’école sur une pirogue. L’embarcation de bois essaime les enfants çà et là sur les langues de terre, puis ils avancent au même rythme que notre bateau, font un peu les marioles, leur ardoise sous le bras, histoire que les voyageurs que nous sommes les emmènent avec eux, gardent à jamais leurs dix ans rayonnants dans une carte mémoire. Plus loin, des femmes cultivent leur jardin au pied de leur maison au toit de chaume. Plus loin encore, d’autres bateaux remontent des chargements d’herbe fraîche, en pyramides immenses, tellement hautes et larges que la barque disparait  – est-ce du fourrage ou un truc du Kerala pour  brouiller notre repère, en rajouter sur la dérive de cette terre d’eau ?

 

Arbre de Cochin

 

Si vous venez au moment de la pleine lune d’août –septembre, tout change – car en Inde, rien n’est jamais acquis, pas même ce qui semble immuable. Pour Onam,  la fête des moissons ou « fête des fleurs de la pluie » qui célèbre  la visite annuelle du très noble Démon Roi Maveli, pendant 10 jours c’est l’effervescence. Les couleurs changent : le camaïeu doux qui décline verts et tons de terre est transformé par des installations florales choc, véritables tableaux éphémères faits d’œillets d’Inde orange vif, de pétales de rose shocking, du violet sec des bougainvilliers et du blanc pur des boutons de jasmin. On sort ses nouveaux vêtements, et  dieu que les saris sont beaux ! On danse la danse Kaikottikali, sur les canaux, les bateaux changent de rythme. Ne ratez pas le Vallamkali, la Course du Bateau Serpent, sur la rivière Pampa. Autant que la course, la préparation vaut le spectacle, lorsque les concurrents décorent leur bateau en chantant. Et participez au Onasadya, le grand repas de la fête, qui ne compte pas moins de 11 à 13 plats essentiels, servis sur des feuilles de bananiers.

 

deux jeunes filles de Cochin

 

On sort en douceur de la campagne avec la ville de Cochin, loin des grandes mégapoles indiennes. On traînera avec plaisir dans sa vieille ville, fera un tour dans la synagogue (emmener avec soi le livre de Rushdie, et relire in-situ le passage sur ses carrelages). Aller ensuite dans l'église Saint-François, la plus ancienne d'Inde, avant de mettre en route ses méninges pour mémoriser (sans faire de fautes d’orthographe), les noms délicieusement indiens de tout ce qu’on a vu : la ville de Thiruvananthapuram près de la plage, le palais de Padmanabhapuram, celui de Krishnapuram et ses peintures murales, et le temple de Peruntirukoilappan.

 

 

LES BONNES RAISONS D’AIMER LE KERALA

 

  • Pour partir à contre-courant, et participer à un spectacle unique et grandiose : l’arrivée de l’immense nuage de mousson sur la pointe sud de l’Inde.
  • Pour monter prendre le frais dans les montagnes : découvrir les plantations de thé et leurs courbes douces, ou tenter de débusquer un tigre du Bengale.
  • Pour assister à un combat de Kalarippayatt, l’ancêtre de tous les arts martiaux dit-on là-bas. Conforme à tout ce qui fait l’Inde où rien n’est jamais simple,  les gurukkal, gourous de kalarippayatt, sont à la fois guerriers et médecins, car ils connaissent autant les techniques qui tuent que celles qui soignent.
  • Pour se faire papouiller : soigner son corps et son esprit en même temps, se faire masser, envelopper d’huiles odorantes, caresser, malaxer, lisser, goûter aux soins ayurvédiques. 

 

Crédits : ©Georg Knoll/LAIF-REA ©Stéphanie Tétu/Picturetank ©Anika Buessemeier/laif ©Georg Knoll/LAIF-REA ©Anika Buessemeier/laif